La finance participative a fait son apparition dans le paysage national. Après les produits bancaires, une formule en matière d’assurance, dite Takaful, pourra être également lancée prochainement. De nombreux citoyens ignorent tout de cette garantie, alors que c’est tout un système qui a ses propres codes de fonctionnement.
Presque toutes les banques marocaines ont lancé une filiale dédiée à la finance participative. Devenues opérationnelles depuis un certain temps, ces entités commencent à séduire de plus en plus les clients à la recherche d’une offre qui répond, entre autres, à leurs convictions religieuses. Mais l’écosystème n’est pas encore mis en place. Car, pour distribuer des crédits participatifs, il faut une assurance participative. C’est dans ce sillage que les compagnies d’assurances ont été appelées à investir le marché à travers des produits dits Takaful.
Inspirée de l’expérience de pays comme Singapour, Malaisie, Indonésie ou du Golfe, l’offre des compagnies marocaines ambitionne de s’adapter au contexte du pays. Sur le plan législatif, le cadre juridique est déjà mis en place à travers la loi 59-13 qui a modifié et complété la loi 17-99 portant Code des assurances. «C’est un texte qui a reçu l’aval du Conseil supérieur des ouléma. Au niveau opérationnel, un modèle économique doit être appliqué à tous les assureurs. Mais chaque compagnie a la possibilité de l’ajuster selon un schéma qui lui convient», souligne un professionnel du secteur.
Le principe de cette assurance est basé selon un schéma bien précis dans lequel un groupe de personnes, dits participants, contribuent mutuellement à un fonds commun (fonds de Takaful) afin d’obtenir une assistance sous forme d’indemnité en cas de sinistre. En effet, le mot Takaful est dérivé de «Kafala» qui veut dire parrainage. De ce fait, Takaful signifie se garantir l’un l’autre (mutuellement) en se basant sur la coopération mutuelle.
Les souscripteurs des contrats apportent les fonds nécessaires à la couverture des risques. Si en fin d’année très peu de sinistres sont enregistrés, des dividendes seront distribués. En cas de perte, il faudra recapitaliser le fonds. Les participants sont en fait les vrais propriétaires du fonds et la compagnie d’assurances ne joue qu’un rôle de gestionnaire. Elle est rémunérée à travers des commissions.
Pour le moment, aucun produit de ce genre n’est commercialisé sur le marché marocain. Plusieurs détails sont à définir et certains points doivent être tirés au clair que ce soit par la profession ou par la tutelle. En tout cas, les assureurs ont créé des équipes spécialisées pour concevoir les offres en conformité avec la réglementation en vigueur et aussi avec les directives de la Fédération marocaine des sociétés d’assurance et de réassurance (FMSAR) et de l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS). En matière de couverture et d’indemnisation, Takaful fonctionne quasiment comme une garantie conventionnelle. La gamme comprend une offre basique assimilée à une responsabilité civile, une autre intermédiaire et une dernière de type tous risques.
«Il faut une période d’essai, d’expérimentation et de simulation avant que l’activité Takaful puisse prendre sa vitesse de croisière. C’est comme les produits participatifs, il faut patienter jusqu’à ce que ce type d’assurance soit assimilé par les clients et les agents», souligne un assureur à Casablanca.
Annoncée au début de 2018, tout laisse présager que Takaful mettra encore du temps pour être disponible sur le marché. Les opérateurs ainsi que la tutelle restent prudents, et veulent prendre toutes les dispositions nécessaires avant d’investir l’activité. Les offres et le fonctionnement de ce segment doivent répondre à certains critères pour le réussir.

Des contraintes de taille pour le lancement
La branche auto enregistre près de 30% de parts de marché du secteur des assurances. C’est donc une niche intéressante pour les compagnies, qui les incite à recruter les clients intéressés par Takaful. Mais techniquement, le lancement de cette offre nécessite un réseau dédié, des investissements, une formation des agents. Toutefois, d’autres contraintes de taille perturbent l’évolution de ce segment. En effet, les compagnies d’assurances doivent se conformer aux principes de la Charia Compliant en matière d’investissement. Les placements doivent se faire dans des fonds halal ou dans le capital des entreprises qui n’opèrent pas dans des activités prohibées, comme les boissons alcoolisées et les jeux du hasard. Les transactions effectuées ne doivent pas être rémunérées par des intérêts.